11 mars 2024

Michel Ducas - mducas@medialo.ca

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©Medialo-Michel Ducas - Le Citoyen Rouyn - La Sarre

Danièle Henkel a galvanisé la centaine de femmes qui ont assisté à sa conférence, le 8 mars dernier, à l’invitation de Femmes en affaires de la Vallée-de-l’Or.

En apéritif, la centaine de personnes présentes à l’Auberge Harricana ont eu droit au parcours de trois femmes inspirantes de la région :  Céline Mailhot, conseillère en placement chez IA Groupe financier, Tanya Pash, présidente d’Air Creebec, et Julie Pelletier, propriétaire du marché IGA Famille Pelletier.  Elles ont évoqué les diverses facettes de leurs réussites : l’ascension dans un monde traditionnellement masculin, la conciliation travail-famille, et les défis à relever dans une entreprise familiale.  « Il ne faut pas avoir peur d’investir en vous », a notamment dit Mme Mailhot aux convives présentes (vous me permettrez ici d’utiliser le féminin, puisqu’il n’y avait que quelques rares hommes dans la salle).  Cet appel a résonné non seulement avec les femmes présentes, mais aussi avec les deux autres panélistes.  « Avec ton caractère, tu peux forger ta propre identité », a acquiescé Julie Pelletier.   « Les femmes doivent se supporter entre elles », a conclu Tanya Pash. 

La pièce de résistance 

Puis, la pièce de résistance.  Bien connue pour ses apparitions télévisées dans l’émission Les Dragons, Danièle Henkel avait plusieurs messages forts à lancer aux femmes d’affaires de Val-d’Or.  « Nous avons le plus grand des pouvoirs : celui de donner la Vie », a-t-elle lancé en introduction de son allocution.  Et elle sait de quoi elle parle.  Mère de quatre enfants, elle a quitté le Maghreb à 34 ans, elle qui travaillait à l’époque pour le Département d’État américain.  « J’ai choisi le Québec, et je ne l’ai jamais regretté », dit-elle.     

Danièle Henkel insiste sur un concept :  la complémentarité.  « Avec le mouvement Femmessor (aujourd’hui appelé Évol), on est allées chercher 60 M$ pour l’entrepreneuriat féminin.  Voilà ce qu’on peut faire quand on se soutient malgré nos différences.  La complémentarité est la plus grande des richesses.  L’idée, ce n’est pas d’être l’autre.  C’est de s’inspirer du meilleur de l’autre en restant soi-même.  Il faut continuer, la tête haute, d’avancer, d’être là pour nos soeurs. »    

Une évolution 

Depuis son arrivée au Québec, il y a 34 ans, Danièle Henkel a vu la femme québécoise déployer ses ailes.  « Aujourd’hui, il y a du financement, de l’accompagnement, du mentorat pour les femmes entrepreneures, rappelle Mme Henkel, en entrevue au Citoyen.  Il y a donc eu une évolution sur plusieurs aspects.  Quand je suis arrivée, il y a 34 ans, il n’y avait pas de mentor, il y avait très peu de programmes, personne ne les connaissait, et surtout, il n’y avait aucune accessibilité au financement, encore bien moins quand tu es une maman, que tu es immigrante, que tu as quatre enfants, et que tu rêves de partir ta propre entreprise avec zéro dollar dans tes poches!  Il faut avoir du front tout le tour de la tête! »  

De la vigilance 

Malgré les victoires des femmes au fil des ans, Danièle Henkel estime qu’il y a encore loin de la coupe aux lèvres pour les femmes entrepreneures.  En cela, elle rejoint Simone de Beauvoir, qui avait dit, dans les années 1940 : « N’oubliez pas qu’il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question.  Ces droits ne sont jamais acquis. » « La pandémie ne nous a pas aidées, rappelle Mme Henkel, qui cite en cela une étude faite par l’école des Hautes études commerciales, en collaboration avec Évol.  En 2022, la situation des femmes a régressé de 30 ans.  Ce n’est pas drôle.  Des femmes ont perdu leur emploi, des femmes sont retournées à la maison pour s’occuper des enfants, et des femmes entrepreneures ont décidé de déposer les armes pour pallier d’autres urgences.  Je trouve que les femmes sont encore celles qui paient les plus hauts prix quand il est question de sacrifices. » 

La Dragonne s’interroge d’ailleurs sur les raisons de cette régression.  « Le Secrétaire général des Nations-Unies, M. Guttierréz, a dit récemment que dans l’état actuel des choses, il faudra 300 ans avant d’avoir une égalité quelconque entre les sexes.  Ce n’est quand même pas rien.  J’ai l’impression qu’on essaie de retourner dans les années 1950, comme si la femme n’avait pas les compétences, la capacité ni même le droit.  Pourquoi? »    

Val-d’Or plutôt que New York 

Fait amusant : Danièle Henkel a démontré son sens de l’engagement.  En début de conférence, elle a raconté qu’elle avait reçu une invitation pour aller prononcer une allocution devant les Nations-Unies, à New York, mais qu’elle avait décliné l’invitation pour venir à Val-d’Or.  « J’avais été invitée par la Secrétaire générale de l’Organisation internationale de la Francophonie, Louise Mushikiwabo, pour prendre la parole à New York.  Je lui ai répondu que j’avais été invitée à Val-d’Or!  Pourquoi?  Parce que ce n’est pas tout le monde qui vient à Val-d’Or pour rencontrer nos entrepreneures québécoises.  Et parce qu’aujourd’hui (vendredi), pour moi, c’est une journée spéciale.  J’avais envie de venir leur dire que tout est possible si on y met le temps, l’énergie, le courage, la vision et la confiance en soi. »